|741 Ensuyvent aucunes autres exhortacions faictes aux mourans.

|742 Selon ce que dit le glorieux apostre de Dieu monseigneur saint Pol, |743 Sine fide impossible est placere Deo, |744 c’est a dire que « Sans foy, il est impossible de plaire a Dieu ». |745 Pour ce, l’ancien ennemy, le dyable d’enfer, ayant congnoissance icelle foy estre la pierre du fondement de l’Eglise et la naissance de toutes vertus, |746 il s’efforce de l’impugner et assaillir en moult de merveilleuses manieres, comme par faulses opinions et erronees ymaginacions. |747 Et, celuy qu’il ne peut dejecter de la stabilité et fermeté de la foy, touteffois, il se met en fait de le pertroubler sans relache par faulses industries et dolositéz.

|748 Par quoy, a ses temptacions et machinacions, il est a obvier et a aller en l’encontre cauteleusement et espirituellement, |749 c’est assavoir mettre en nonchaloir toutes les fantasies, ymagnacions, choses erronees plaines de venin, blasphemes et toutes choses veues et ouÿes par sa faulseté et les porter paciamment et esperer fort en la misericorde de Dieu, |750 car, comme il est escript, les cogitacions des hommes sont vaines et moult diverses et ainsi comme infnies.

|751 Pour icelle cause, l’home ne doit point se joindre ne se unir ne arrester ne discuter ne enquerir les causes pour quoy il souffre et soustient telles fantasies et telles eurres impu [d i r]gnantes et bataillantes encontre la foy et toutes bonnes meurs, |752 car de tant que aucun s’arreste plus aux choses erronees, c’est a dire plaines d’erreurs dyaboliques et faulses sugestions, en voulant les excecuter et experimenter, tant plus tost se nourrit il en erreur et en ennuy de pensee.

|753 Mais, pourtant, pour telles choses contraires, l’omme ne doit pas oultre mesure enquerir ne blasmer ne celles ymaginacions imputer absolutement et determinement a sa defaulte, |754 car c’est temptacion au regard de coupe.

|755 Et, pourtant, a tout loyal, la temptacion de ces choses est du tout en tout contre sa voulenté et a luy moult desplaisante |756 et, pour ce qu’elle luy est paine, elle ne luy est reputee a aucun pechié |757 mais luy est purgacion de son ame, enforcement de pacience, action et effect de humilité, instigacion et esmouvement a esperance de la vie eternelle.

|758 Car saint Augustin dit, au livre De Vraie religion : |759 Omne enim peccatum est voluntarium et, si non sit voluntarium, non est peccatum, |760 c’est a dire que « Tout pechié est voluntaire et, s’il n’est voluntaire, c’est a dire se la voulenté ne s’y consent, ce n’est point pechié ».

|761 Et, pour ce, dit Isidore : |762 Qui, passionibus anime insidiante, adversario cruciatur, non idcirco se credat alienari a Christo, qui talia patitur, sed magis laudet Deum, qui hujus virgule corrigit ipsum ut spiritus salvus fiat, |763 c’est a dire que « L’ame la quelle est tourmentee par les passions de l’esperit adversaire, qui toujours l’espie, ne doit point ymaginer pourtant estre estranger de Jesucrist, s’il seuffre qu’elle les porte, mais le doit plus louer pour ce qu’il la corrige de telle verge affin que son esperit soit sauvé », |764 car sachéz de certain que telle passion est reputee pour vertu a celuy qui la porte.

|765 Et, combien qu’il soit ainsi qu’on soit ignorant et qu’on ne sache pour quel vice ou pour quelle cause on seuffre ces choses, |766 touteffois, Dieu, qui fait son soleil luyre sur les bons et sur les mauvais, le sçait et recommande estre humblement juste et misericordieusement, |767 car le dyable ne peut plus tempter les esleus que la voulenté de Dieu le permet.

|768 Et, s’il est ainsi que, en nous temptant, il nous sert a nostre prouffit combien qu’il ne le veulle pas, touteffois, sa temptacion sert a l’utilité des saintz, |769 car les temptacions les quelles ilz poursuyvent pour [d i v] la perdicion de l’omme, Jesucrist les convertist salutairement en salut et en vertus d’icelluy. |770 Et soies certain que jamais nostre adversaire n’est vacant qu’il ne soit toujours prest de grever l’omme en esmouvant vers luy grans assaulx de temptacions |771 ou par tribulacions de cueur les quelles il luy fait porter ou par douleurs de corps les quelles il luy fait souffrir.

|772 En aprés aussi, la force malicieuse des dyables souvent tourmente la pensee du juste de diverses douleurs tant que, aucune fois, il est contraint d’encheoir jusques en desesperacion pour la tres grande angoisse qu’il sent. |773 Mais, quant l’ame demeure en la crainte et amour de Dieu, celle douleur et angoisse luy prouffite moult, |774 car, de quelconque maladie ou angoisse de quoy elle soit tourmentee, elle n’est pas pourtant de Dieu separee mais conjointe et en son amour preservee. |775 Et, ja soit ce que l’omme juste seuffre en son ame plusieurs choses adverses par l’instigacion et esmouvement du dyable, touteffois, il ne le peut faire perir de la vie eternelle pour toutes ses machinacions, |776 car le Seigneur debonnaire ne repute jamais a dampnacion de couppe la chose la quelle il seuffre par la permission de sa divine Majesté, ce qu’il ne voulsist point.

|777 Et, pour ce, nous ne pechons point se ce n’est par la couvoitise de nostre desir ou se nous ne flechissons au delict et voluptuosité, |778 car ce en quoy nous somes amenéz par violence et contre nostre voulenté nous est seulement paine et misere et non pas couppe ou pechié.

|779 Et, pour ce, dit Isodore que |780 « Aucune fois, il semble a celuy qui est tempté que telle desloyaulté ou doubte n’est pas petite couppe la quelle il estime par illusion des dyables qui mettent paour avec luy. |781 Et, combien que telle doubte ne soit point de la foy, la quelle doubte est couppe voluntaire ou au moins ignorance affectee et sans cause la quelle contient plus erreur que verité. |782 Et, comme il soit ainsi que foy soit habit de la voulenté, c’est a dire que tu crois par foy et croire c’est croire ou esperer est esperer et non doubter est non doubter.

|783 Pour ce dit l’Apostre : |784 Corde creditur ad justiciam, |785 c’est a entendre que « Ta voulenté est en ton cueur et, ce que ton cueur croit de bien, il est reputé a justice », |786 car en la [d ii r] voulenté la quelle ne peut estre contrainte gist tout le merite ou desmerite, c’est a dire bien ou mal.

|787 Touteffois, la pensee est aucune fois obfusquee en telle maniere que aucun ne peut congnoistre sa voulenté, mais, pourtant, on ne se doit troubler, |788 car les bonnes œuvres preuvent la voulenté estre bonne et les mauvaises œuvres prouvent la voulenté estre mauvaise. |789 Mais, aucune fois, les mauvaises œuvres presument estre bonnes jusques a ce que raisonnablement ilz soient congnues estre mauvaises.

|790 Et, s’il advient que celle temptacion devant dicte soit en toy, offrant a ta pensee choses faulses pour vrayes, et qu’elle te trouble continuellement, |791 tu dois, par maniere de adjuracion et de accersion contraire, exprimer et declairer ta foy par ta bouche encontre la temptacion couverte, cauteleuse et soubtille.

|792 Et, se sains iest que ta congnoissance ne s’y consente, il est escript : |793 Ore autem confessio fit ad salutem, |794 c’est a dire que « La confession la quelle est faicte de la bouche est au salut ». |795 Car, de certain, nul n’est deceu des falaces de l’ennemy adversaire qui deliberement et appertement est trouvé en icelles contrediseur tant en fait qu’en parolle.

|796 Et, pourtant donc, l’enemy est moult debile qui ne peut vaincre sy non le voulant et la voulenté deliberee.

|797 Non pourtant, nul ne doit en telles choses enquerir le quel voit les ennemys tempter diversement les eslus de Dieu, |798 car le dyable congnoit et espie la prompte inclinacion de la complexion d’un chacun. |799 Et, celuy qu’il voit trop enrousé d’umeur melencolique, iceluy ennemy le travaille et pertrouble merveilleusement de temptacion espiritelle, |800 car, comme les docteurs parlans des choses naturelles dient, la fumee de noire couleur passante jusques au cervel parvient au lieu de la pensee et luy obscurcit et trouble sa lumiere en telle maniere que l’ame ne sçait rien juger ou discerner.

|801 Telz donc sont tristes et craintifz et, sans cause raisonnable, faitz pusillanimes et de petite courage et maigres de complexion, |802 mais, pourtant, celle crainte et tristresse ne leur est pas imputee a couppe, car ce leur est paine et contre leur voulenté. |803 Et souvent sont deceus de dyable, cuidans et ayans en opinions choses faulses estre vrayes, |804 car, comme j’ay [d ii v] dit devant, ilz sont empeschéz pour la noire fumee couvrante leur cerveau, c’est a entendre pour leur complexion, |805 qu’ilz ne peuent discerner le vray du faulx ne la chose certaine de la chose incertaine. |806 Et icelluy auldit ennemy considere l’estat d’un chacun.

|807 Et, pour ce, Leon pape dit, en ung sermon de la circoncision Nostre Seigneur : |808 Non desinit hostis antiquus decepcionum laqueos ubi licet pretendere et ut fidem credencium quo modo corrumpat instare, |809 c’est a dire que « L’ancien ennemy, le dyable d’enfer, ne cesse instamment de tendre ses las de decepcion par tous lieux affin qu’il puisse en aucune maniere corrumpre la foy des creans », |810 car il congnoit a qui il baille la chaleur de couvoitise, a qui il conseille et enseigne les delectacions de gloutonnie, |811 a qui il met les incitacions et esmouvemens de luxure et a qui il espant le venin d’envye. |812 Il congnoit le quel il trouble en erreur, le quel il deçoit par joye, le quel il tue par pensee, le quel il seduyt par admiracion. |813 Il discerne et congnoit les coustumes de tous, les espart, il en a soing, il espie et enquiert les affections |814 et, en toutes ces choses, il quiert cause de nuyre en tout lieu et principallement ou il trouve qu’on est ocuppé tres curieusement.

|815 Et, a ce propos, Leon pape dit : |816 Hinc est quod frequenter immittit tantam amaritudinem mentibus fidelium complexionem agitando ac timorem incuciendo quod vivere eis creditur supplicium et mori lucrum et remedium, |817 c’est a dire que « L’ennemy d’enfer souvent met tant de amertume et de tristesse aux pensees des loyaulx amys de Dieu en debtant leur complection et metant en eulx telle paour qu’ilz croient vivre leur estre tourment et mourir leur estre prouffit » |818 et tant que aucune fois pou s’en fault qu’ilz ne se desesperent de la vie du corps et de l’ame, |819 car a cause de telles sourvenantes temptacions, ilz cuident estre delaisséz et relenquis de Dieu, qui permet ses esleus estre ainsi esprouvéz.

|820 Et est ce que dit l’Ecclesiastique : |821 Vasa figuli probat fornax, homines autem justos temptacio tribulacionis, |822 c’est a dire que « La fournaise esprouve les vesseaulx du potier et la temptacion de tribulacion esprouve les hommes justes » ;

|823 Et Job dit : |824 Probavit me quasi aurum quod per ignem transit qui scit omnes d iii r] vias meas, |825 c’est a dire « Celuy qui sçait toutes mes voies m’a esprouvé ainsi comme l’or qui passe par le feu. »

|826 Et a ce propos dit l’Apostre : |827 Modicum oportet contristari in presenti ut probacio fidei nostre multo preciosior sit auro quod per ignem probatur, |828 c’est a dire qu’« Il est necessaire d’estre ung pou troublé en ce present temps affin que la probacion de nostre foy appaire plus precieuse que n’est l’or qui est esprouvé par le feu ».

|829 Et, pour ce, dit l’ange a Thobie : |830 Quia acceptus eras a Deo, necesse erat ut temptacio probaret te, |831 c’est a dire « Pour ce que tu estoies a Dieu agreable, il estoit necessaire que la temptacion t’esprouvast. »

|832 Et, a ceste cause il est necessaire par force espirituelle, c’est assavoir l’amertume devant dicte ou tribulacion envoiee, la porter pacientement en la soustenant humblement |833 et dire avec Job, par forme et maniere de pacience : |834 Si bona suscepimus de manu Domini, mala autem quare non suscipiamus ?, |835 c’est a dire « Se nous avons receu les biens de la mains de Nostre Seigneur, pourquoy ne receverons nous les maulx » |836 en recordant le merite de pacience en ce present temps et le louyer de la joye au temps ad venir ? |837 Prie donc ung chacun avecques Job Nostre Seigneur qu’il n’espargne point la douleur et die que, se l’ennemy l’a occis, qu’il esperera a son Seigneur.

|838 Et quelle merveille est ce se l’omme mort et meschant est troublé en ce temps present quant le Saulveur de tout le monde, par son Psalmiste, dit de luy mesmes : |839 Anima mea turbata est valde, |840 c’est a dire « Mon ame est tres troublee. »

|841 Et, plus oultre, en son Evangile : |842 Tristis est anima mea usque ad mortem, |843 c’est a dire « Mon ame est triste jusques a la mort. » |844 Et mesmes, en sa passion, il croit a son Pere, disant |845 Deus meus, Deus meus, ut quid dereliquisti me ?, |846 c’est a dire « O mon Dieu, mon Dieu, m’as tu relenqui ? ».

|847 Recorde pareillement le dit de Isaÿe le prophete parlant en la personne de Dieu : |848 In modico dereliqui |849 et, in momento indignacionis mee, adbscondi parumque faciem meam a te |850 et in misericordia sempiterna miserus sum tui, |851 c’est a dire « Je t’ay delaissé ung petit de temps |852 et, au mouvement de mon indignacion, j’ay muché ung pou ma face de toy, |853 mais ce non obstant, j’ay eu de toy pitié en ma misericorde sem[d iii v]piternelle. »

|854 Et, certainement, la chose est moult briefve et de petit mouvement la quelle nous souffrons en ce temps present au regart de la retribucion eternelle qui est misericordieusement esperee et attendue. |855 Nul donques ne se doit esmerveiller se aucun homme espirituel est tempté espirituellement et ainsi comme singulierement, |856 car sa bonne voulenté en luy demourante ne souffrira point qu’il soit dejetté hors de foy, d’esperance ne de charité, |857 mais en sera plus ferme, plus constant et plus fort et robuste en toute vertu.

|858 Et, pour celle cause, Nostre doulx Sauveur Jesucrist enseignoit a ses disciples le prouffit et le remede quant il disoit : |859 Ecce Sathanas expetivit vos ut cribraret sicut triticum, |860 c’est a dire « J’ay veu Sathan le quel a enquis et espié contre vous affin qu’il vous crible comme le fourment ». |861 Il est a entendre que, ainsi comme le bon grain est par le crible esleu du mauvais, ainsi le dyable eslyt les œuvres vertueuses des bons en regardant la maniere comme il les pourra faire perir par le crible de ses fallacieuses temptacions.

|862 Et, certainement, aucun est criblé quant, dedens, en sa pensee, espirituellement et parfaictement, il est examiné.  |863 Il est aussi roboré, parfait et enforci quant, par la vertu de pacience et d’oraison devote et salutaire ammonicion de son prochain, il est confermé en bien.

|864 Et, pour ce, s’ensuyt : |865 Ego autem pro te rogavi ut non deficiat fides tua et tu aliquando conversus confirma fratres tuos, |866 c’est a dire « J’ay pour toy prié que ta foy ne defaille point et, pour ce, quant tu l’auras congnu, conferme et conseille tes freres », c’est assavoir tes prochains.

|867 Et, s’aucun est confermé par la monicion de son prochain et qu’il soit parfait en Jesucrist, die ce vers : |868 Quare tristis es, anima mea, et quare conturbas me ? Spera in Deo,  |869 c’est a dire « O mon ame, pourquoy es tu marrie et triste et pourquoy me troubles tu ? Espere de Nostre Seigneur. »

|870 Et, adonc, de rechief, prie et chante de cueur et face les biens les quelz il peut faire |871 et regarde la saincte Escripture et recorde les parolles des prophetes et mesmes commande et mette en sa memoire les ditz de la saincte Evangile. |872 Et, s’il est ainsi qu’il ne treuve en ces choses aucune sensible devocion, la soustienne pacientement.

|873 Touteffois, [d iiii r] ait et mette paine d’avoir celle devocion, la quelle peut suffire pour son salut, |874 car utilement et pour nostre prouffit nous est soustraicte l’actuelle devocion, affin que plus meritoirement soit faicte oraison.

|875 Et, pour ce, dit saint Bernard sur celle cantique : |876 Quesivi et non inveni, et cetera : |877 Abscondit se sponsus dum queritur ut avidius queratur,  |878 c’est a dire « J’ay quis mon espoux et ne l’ay point trouvé, car il se muche quant on le quiert affin que par plus grant soing il soit quis. »

|879 Et, a ce propos, dit saint Augustin, au Livre des parolles de Nostre Seigneur : |880 Cum aliquando Deus tardius dat sua bona commendat non negat,  |881 c’est a dire que « Quant aucune fois Dieu donne tart la chose qu’on luy demande, il n’est pas a entendre pourtant qu’il la denye mais il le fait en commandant a garder ses biens le quelz il donne ». |882 Car les choses longuement desirees sont plus songneusement gardees et aymees |883 et, par raison contraire, les choses qui legierement sont donnees, on les tient villes et non pas chieres.

|884 Et, pour ce doncques, demande. |885 Quier en demandant justes choses et, en querant, cresces, |886 c’est a dire « En requerant, demande chose de valeur affin que tu prennes », |887 c’est a dire « Affin que par demander choses villes, tu ne soies indigne de obtenir ce que tu demandes ». |888 Car, pourtant, saches que se tu n’as effect de ta demande legierement, icelluy t’est gardé et ne te veult pas Dieu bailler, affin que tu ayes cause de graigneur chose demander. »

|889 Et, pour ce, dit saint Augustin : |890 Tunc sancti melius exaudiuntur quando non ad nutum exaudiuntur, |891 c’est a dire que « Les saintz sont mieulx essaucéz quant ilz ne sont pas du tout a leur plaisir et voulenté essaucéz », |892 c’est a dire « incontinent et en la façon ou maniere qu’ilz le requierent ». |893 Car, au premier temps de la conversion, Dieu donne et ottroie a aucuns devocion de souefveté et de doulceur affin qu’ilz soient convertis en l’amour de Nostre Seigneur et qu’ilz soient plus fermes. |894 Et, aprés ces choses, il leur soustrait celle devocion de doulceur affin qu’ilz deservent plus de merite et que, en le desservant, ilz soient couronnéz plus souverainement.

|895 Et, pour ce, dit le Philosophe : |896 Cum enim virtus consistat circa difficile, illud quod difficilius [d iiii v acquiritur virtuosius obtinetur, |897 c’est a dire « Comme il soit ainsi que vertu trouvee envers les choses dificiles, la chose la quelle est acquise plus difficilement », |898 c’est a dire « a plus grant paine, est la plus songneusement obtenue et plus vertueusement ». |899 Car Nostre Seigneur Jesucrist, en enseignant ceste chose, dit a saint Pierre : |900 Cum autem esses junior, cingebas te et ambulabas ubi volebas. |901 Cum autem senueris, extendes manus tuas et alius te cinget et ducet quo tu non vis.  |902 C’est-à-dire : « O Pierres, quant tu estoies jone, c’est a dire au commencement que je t’appellay, tu te chaingnoies et cheminoies ou tu vouloies, |903 c’est a dire, pourtant que je te demenoies en ma doulceur, ce t’estoit chose plaisante a ta voulenté et a ta sensualité ; |904 mais, maintenant que tu es vieulx, c’est a dire que tu congnois ce que tu ne congnoissoies point de moy, tu estendras tes mains et autre te chaindra et menera la ou tu ne veulx point ». |905 C’est a dire : « Tu souffriras pour moy et seront tes mains estendues en la croix et seras lyé et detenu des lyens de Neron ou de ses ministres et te menera l’en ou tu ne veulx point aller. |906 C’est a dire que, selon ton humanité, tu ne veulx point mourir ».

|907 Et, pour ce dit Dieu a ses apostres nouvellement convertis : |908 Lac vobis potum dedi, non escam, |909 c’est a dire « Je vous ay donné lait et non pas viande ». |910 Car, au commencement de la conversion des apostres, ilz estoient a estre nourris de lait de doulceur et de devocion, pour ce que, aprés, ilz estoient a estre enforcéz de viande de paine et de tribulacion.

|911 Et, comme tu congnois que les petis enfans, au commencement, ne sont pas nourris de grosses viandes mais de petites, comme de lait, de choses doulces et tendres de legiere digestion, |912 et, aprés qu’ilz commencent a croistre et a enforcir, le pain materiel et les autres viandes grosses, les quelles leur estomach peut porter leur sont administrees, ainsi semblablement estoit il des apostres estans avec Jesucrist. |913 Car, devant sa passion, ilz estoient nourris de la doulceur de sa personne et de ses belles parolles et aprés eurent les grosses viandes a gouster, comme de fain, de soif, de froit, de chault, de bastemens de leurs persecuteurs, paines, angoisses, travaulx et crudelitéz, jusques a la mort, aprés qu’ilz [d v r] furent enforcéz de la grace du Saint Esperit.

|914 Et, certainement, c’est chose moult doulce et moult souefve d’ensuyr Dieu avec joyeuseté de pensee et avec paix et tranquilité, |915 mais c’est une chose tres haulte et tres parfaicte d’ensuyr Dieu avec tristesse de cueur par tribulacion de temptacion de foy ou impugnacion et bataille continuele de pensee. |916 Car a monseigneur saint Pierre l’apostre estoit moult doulce chose d’estre avec Nostre Saulveur Jesucrist en sa joyeuse et glorieuse transfiguracion quant il dit : |917 Bonum est nos hic esse, |918 c’est a dire « O Sire Dieu, ce nous est chose moult bonne estre tousjours avec toy en ce lieu ». |919 Mais ce luy fust chose moult dure et moult terrible en sa douloureuse et cruelle persecucion, c’est a dire en la passion, quant il le renya et qu’il dit : |920 Non novi hominem, |921 c’est a dire « Je vous prometz que je ne congneu oncques celuy homme que vous me dictes ».

|922 Et, touteffois, celuy qui par sa doulceur l’a racheté, par nuyt, a la terreur et crainte d’une chamberiere, l’a renyé. |923 Mais, aprés que le dit monseigneur saint Pierre fut enforcé du Saint Esperit, devant les princes et les roys jusques a la mort l’a fermement confessé et son nom a tous manifesté. |924 Et pour celle passion est engendree en partie la complexion de crainte.

|925 Et, pour ce, celuy qui a telle complexion paoureuse se doit forment garder que en chose doubteuse il ne demeure longuement et qu’il n’en enquerre trop parfondement en pensant a luy tout seul |926 mais declaire plainement sa temptacion aux clercz sages et discretz affin que, par le conseil et consolacion d’iceulx, il soit mis en salutaire ammonicion. |927 Car il est escript : |928 Ve soli quia, si ceciderit, non habet sublevantem, |929 c’est a dire : « Paine et douleur est a celuy qui est seul, |930 car, s’il chiet, il n’a aucun qui luy donne ressourse ne allegement. »

|931 Et, pour ce donc, celuy qui est troublé de temptacion et est craintif et triste de sa complexion, il luy est necessité qu’il s’esjouysse par force et bonne vertu de courage, |932 car, de tant plus que aucun est contraint et bataille a soy douloir et estre en crainte, de tant plus se doit donner courage de s’esjouyr et consoler. |933 Et de cecy est il escript : |934 Ibant apostoli gaudentes a conspectu concilii, quoniam digni habiti sunt pro nomine Jesu contumeliam pati, d v v]|935 c’est a dire que « Les apostres s’en alloient esjouyssans de devant le regard du conseil pour ce qu’ilz estoient dignes de souffrir paines et tribulacions pour le nom de Jesucrist. »

|936 Et s’il advient que, par nulle instruction de aucun escript, tu ne sentes aucune consolacion espirituelle, soustien celle tristesse paciamment et humblement et met paine d’avoir et prendre aucune licite et honneste consolacion temporelle |937 en ensuyvant le conseil de l’Apostre, qui dit : |938 Ne forte ex habundanciori tristicia absorbeatur qui hujusmodi est, |939 c’est a dire « Affin que par trop habondante tristesse celuy qui est en ceste maniere en soit deceu et absorbé », |940 car ce qui est fait a cause de utilité et prouffit de recouvrer salut n’est point tourné ne tenu a folie ou vanité. |941 Car saint Gregoire dit que l’ange Sathan invisiblement se transforme en ange de lumiere soubz espesse de bien, admonnestant les pechiéz en couvrant erreurs et choses faulses de couleur de verité |942 affin qu’il puisse advenir a la decepcion des povres ames de Dieu.

|943 Aucune fois, il offre et met en la memoire de l’omme occupé au divin service une doubte de continuelle enqueste de sa conscience et plusieurs autres fantasies |944 affin que, l’office a luy appartenante, soubz espesse de bien il puisse empescher et troubler sa pensee.

|945 Touteffois, combien qu’il soit escript |946 Omnia tempus habent, |947 selon Salomon, |948 c’est a dire que « Toutes choses ont leur temps », |949 encore tu dois savoir le souverain et expert remede pour telles fantacies et ymaginacions oster et les espirituelles temptacions estre destruites, |950 car il est necessaire de resister au commencement. |951 Et, s’il advient que elles t’assaillent estant en ton oraison, en tant comme il t’est possible ne veulles en aucune maniere t’y arrester ne entendre a icelles.

|952 Aucune fois aussi, il remet en memoire les pechéz des quelz vraie confession a esté faicte et des quelz on a eue dure et amere contricion, en troublant la creature et luy mettant en sa pensee qu’ilz ne sont point pardonnéz, |953 ou, au moins, il met en doubte celle chose la quelle autrefois elle congnoissoit estre vraie.

|954 Et iceluy ennemy fait ce par la recordacion et memoire de la confession ou des autres bonnes œuvres en luy presentant une obscurté de petit courage et disposant [d vi r] crainte en sa pensee et luy mettant en courage de retourner a confession.

|955 Mais, pourtant, il ne le fait pas affin que l’ame en soit purgee par icelle confession mais affin que la pensee en soit troublee et par celle doubte soit revoquee et mise hors de transquilité et du bien de paix, |956 car il est esperit tout plain de venin et de pestilence. |957 Hayant la paix de tout cueur uny et conjoint a Dieu, il appete et demande en son affection amertume de turbacion, a la suggestion et ammonicion du quel il est a resister et contredire soubtillement de ceste part, |958 c’est assavoir en dissimulant la confession admonnestee de telles doubtes, la quelle est par la suggestion du dyable d’enfer par maniere de temptacion et de paine, et aussi en la delaissant salutairement, combien que la conscience contredie.

|959 Et, combien que la confession du pechié soit utile et necessaire par vray remors et salutaire compunction, |960 encore vault il mieulx que telle confession admonnestee par la suggestion du dyable d’enfer soit delaissee, |961 car elle pourroit estre infructueuse. |962 Car telle confession n’est pas delaissee par complement de religion chrestienne et d’ordonnance ecclesiastique mais par cautelle et soubtilité de temptacion estre delaissee.

|963 Et, combien qu’il soit ainsi que une chose soit congnue estre mauvaise, touteffois toute chose est bonne qui est faicte en bonne intencion, |964 car la cause pourquoy la chose est faicte et, avecques ce, l’intencion donnent a l’œuvre finale devocion et remuneracion. |965 Et cecy nous a enseigné Jesucrist quant il fust tempté par la suggestion du dyable d’enfer, en luy disant : |966 « Se tu es filz de Dieu envoyé, laisse toy cheoir de hault en bas ». |967 Mais, pourtant, il ne le voulut pas faire en ceste maniere, |968 car il eslut a decliner et a delaissser les machinacions et temptacions d’icelluy en descendant par les degréz de discrecion, |969 nous donnant exemple que nous ne debvons point legierement obeir a la suggestion du dyable, la quelle il nous baille et presente souvent soubz espesse de bien, |970 mais nous debvons resister et aller a l’encontre par la voie et degréz de discretion.

|971 Aucune fois aussi, le mauvais esperit faulx et erronique empesche la pensee de l’omme par diverses manieres de vices et de pechiéz fort differens |972 et, par diverses occultes [d vi v] et muchees commocions, demonstrant estre chose illicite et pechié la quelle en soy est bonne ou demonstrant la chose estre bonne la quelle en soy est mauvaise ou la chose estre mortelle la quelle en soy est venielle.

|973 Et de telles choses pense la creature que continuellement il appartient estre confessé |974 et, en ces choses, tant plus y met sa pensee et les arreste en sa memoire, tant plus indiscretement se trouble et se deçoit. |975 Car iceluy ennemy ne quiert et ne demande fors qu’il face paour et trouble la pensee et qu’il l’empesche de bien faire et qu’il forge et institue a la creature conscience plaine d’erreur.

|976 Et mesmes, aucune fois, il contraint plus fort consentir a la conscience erronee et decevable que humblement obeir a la discrecion et enseignement d’aucun bon conseil, la quelle chose est moult diverse et heretique.

|977 Pour celle cause donc, aucun tempté en telle maniere doit de mettre telle erreur a l’arbitre et determinacion du maistre espirituel et ensuyvir la vérité. |978 Et, s’il est ainsi qu’il ne veulle humblement obeir et que telle erreur voluntaire demeure en sa pensee, l’apostre enseigne ung remede en l’encontre, disant : |979 Nolite credere omni sporitui, sed probate qui sunt spiritus Dei, |980 c’est a dire « Ne veulléz pas croire a tout esperit, |981 c’est a entendre a toute pensee, mais esprouvéz les quelz esperitz, c’est a dire les quelles pensees, sont de Dieu. »

|982 Et, pour les esprouver et savoir, discrecion, mere de vertus, nous est en toutes choses necessaire. |983 De la quelle saint Gregoire dit en ceste maniere : |984 Discrecio est auriga virtuum ut inter bonum et malum recte dijudicetur ne quis sub specie boni incaute fallatur, |985 c’est a dire que « Discrecion est mere et adresse de vertus affin que par elle on sache jugier et discerner entre le bien et le mal et que aucun ne soit, soubz espesse de bien, cauteleusement deceu ».

|986 Et dit saint Augustin de l’esperit et de l’ame : |987 Humanus spiritus aliquando bonus aliquando malus spiritus assumitur, nec facile discerni potest qualis spiritus assumatur nisi quia bonus instruit, malus autem fallit, |988 c’est a dire que « L’esperit humain aucune fois est prins pour le bon, aucune fois pour le mauvais et est chose moult difficile a discerner se du bon ou du mauvais les bonnes pensees nous sont donnees, sy non par ce que le [e i r] bon instruit et enseigne et le mauvais met paine de decepvoir ».

|989 Et, aucune fois, il admonneste le bien a estre fait |990 affin que plus legierement il seduyse et decepve en son intencion plaine de dolosité. |991 Pour la quelle cause, il n’est pas bon de croire du tout a soy ne soy arrester a son propre sens, mais on doit plus obeir a la verité du tesmoing des Escriptures et a reguliere discrecion, |992 car, pour certain, icelluy ancien serpent est deceptible, mauvais, fraudulent et decepveur des ames. |993 Le quel, adonc, quant il apperçoit qu’il ne peut mettre nul erreur de pechié en la pensee par ses decepcions fraudulentes, il s’efforce aucunement la cuyder encliner et flechir par trop grant paour |994 en luy forgant, disposant et mettant en sa memoire chose faulse et terrible et en luy espandant le venin de sa malicieuse, perverse et cauteleuse iniquité, comme par diverses et differentes ymaginacions, |995 et, avec ce, s’efforce luy aggraver son enfermeté de intollerable paine. |996 Et toutes ces choses affin que, par la diversité et varieté d’icelles, il le puisse atraire en aucune |997 et, par aucun bien commencé, il fasce cheoir et trebucher la creature et qu’il en puisse faire moquerie et derrision.

|998 Il est donc utile, necessaire et convenable que, a toutes ses suggestions et souvenances premieres les quelles il met en la pensee de chacune creature soubz espesse de bien, qu’on les refuse et resiste |999 en tant que force humaine le peut faire moiennant la grace de Dieu et que ceste paine de ses ameres temptacions soit humblement et pacientement portee, la quelle il met en la pensee craintive et aussi par luy tourmentee.

|1000 Aucune fois, s’il s’efforce et met paine de grever la creature en son dormir par diverses illusions et erreurs, la quelle il ne peut en veillant faire cheoir en pechié. |1001 Et de cecy dit saint Gregoire, en ses Morales sur Job : |1002 Terrebit ne per sompnia hostis insidians quo electos vigilantes minime superat et dormientes gravius impugnat, |1003 c’est a dire que « Le dyable d’enfer espie les eslus de Dieu par divers songes affin que, tant qu’ilz sont formans, il les poingne et face trebucher plus griefvement, les quelz par nulle maniere, tant comme ilz ont esté veillans, il n’a peu surmonter par pechié ».

|1004 Et ces choses seuffre et permet be[e i v]gninement Dieu, que es cueurs de ces eslus l’ennemy d’enfer ne cesse mettre elles passions, |1005 affin que par le repos de dormir ne soit perdu le louyer le quel leur est appareillé a cause des refus, opposicions et bonnes resistences les quelles ilz ont faictes en l’encontre d’icelluy ennemy.

|1006 O en quantes manieres merveilleuses et diverses l’ame de l’omme le quel craint Dieu est debatue et assaillie, |1007 car ce nous tesmoigne ce qui est prins en une hympne, ainsi disant : |1008 O serpens tortuose, qui mille per meandros agitas quieta corda, discede, liquesce : |1009 Christus nobiscum est, |1010 c’est a dire « O serpent qui point ne chemines par la droite voie, qui debatz et tourmentes les cueurs paissibles par mile manieres de voies obliques et plaines de decepcion, depart toy et te met en fuyte, |1011 car Jesucrist est avecques nous. »

|1012 O tres mauvais transgresseur de l’amour de Dieu, le signe de la croix condampne ta compaignie !

|1013 O tant c’est chose debonnaire, utile, caritative et salutaire, conforter et renforcer le troublé, le tourmenté, le desolé et relenqui et mesmes le passant par le feu de probacion ou par le fournet de tribulacion |1014 et le mener en refrigeracion et affreschissement de repos et en consolacion contenante esperance de pardon !

|1015 Et, se ainsi est que le troublé de telles persuasions ne puisse obtenir et prendre consolacion mais par longue espace de temps ait deffaulte d’icelle, |1016 touteffois ait esperance et croie fermement qu’il doit avoir finablement consolacion espirituelle, |1017 car Bonaventure dit en ceste maniere : |1018 O mire benignitatis Altissime, qui nos temptari permittis, non ut capiamur sed et timentes ad te portum tutissimum fugiamus ! |1019 c’est a dire « O tres Souverain de benignité merveilleuse, qui nous permetz estre temptéz, non pas |1020 affin que nous soions prins et deceus mais affin que nous, qui sommes craintifz, courons a toy qui es port tres sceur ! »

|1021 O Sire Dieu, qui fais toutes ces choses en la maniere de la bonne mere la quelle desire veoir et embracher son petit filz eslongné d’icelle, |1022 car elle luy fait avoir paour par aucune chose terrible et espouentable et adonc estent les bras et reçoit son filz accourant pour estre de elle conservé et luy fait joie et rys et luy donne et eslargit moult de doulz baissiers |1023 et puis [e ii r] l’instruit et exhorte qu’il ne se departe plus d’avecques elle, |1024 affin qu’il n’en chiesse en celuy mal par le quel luy pourroit inconvenient venir ! |1025 Aprés le reconforte et de rechief, l’estraingnant entre ses bras, luy administre ses mammelles.

|1026 O donc beneuree temptacion la quelle ne contraint point fuyre ne eslongner des embrachemens divins !

|1027 O doulx Sire, qui permetz que nous soions fuitifz en tous lieux et tousjours, tu te donnes a nous, refuge salutaire, affin qu’en tout temps nous demourons avec toy !

|1028 O homme, ne t’esmerveille point se tu as aucunes temptacions mais, se tu les crains, met ta fuyte en Dieu, |1029 car c’est le lieu par le quel tu auras sceurté, ou, se tu n’y fais ton cours, tu pourras estre prins et eternellement dampné ! |1030 Et, se ainsi est que tu congnoisses estre trop eslongné de ton Dieu par tes deffaultes et que tu ne puisses a luy courir de plain cueur et devot, |1031 haste toy de approucher et tenir pres de Jesucrist et te muche au puis de son destre costé perché pour toy et te couvre du drap de vraie confidence et n’aies doubte que l’ennemy d’enfer ne te fera point de terreur. |1032 Et tien tousjours pour rigle generale que quiconques vouldra incliner Dieu a soy, il doit profondement penser et porter en son cueur les plaies de Jesucrist et qu’il soit tout enrousé de son sang. |1033 Et, s’il est ainsi, il pourra fuyr sceurement et faire son cours a Dieu son Pere |1034 et icelluy, tres doulx, le pourverra plainement comme son filz en ce qui luy sera utile, necessaire et convenable. |1035 Approuche donc a Jesucrist et le prie humblement qu’il te veulle en son sang renouveller ses plaies, |1036 combien qu’il n’appartient pas icelluy Jesucrist encore une fois estre deplayé et vulneré, et qu’il te veulle totalement taindre et vestir en son sang. |1037 Et, se tu es ainsi vestu de ce vestement, tu pourras aller et entrer sceurement au palais du Roy celestiel.

|1038 O toy donc, quiconques es tempté, met en ton cueur et pense chacun jour les plaies de Jesucrist et icelles te seront tousjours refrigeracion, joye et consolacion. |1039 Et ne doubtes mais croy fermement que, se tu les metz, emprains et escriptz en ton cueur, que tu ne seras amené ne seduyt a quelconque temptacion. |1040 Mais dy moy qui est celuy le quel veulle ou ose plus de rechief [e ii v] perpetrer et commettre nulles defaultes ou pechiéz s’il voit et considere que le Seigneur de gloire est deplayé et vulneré pour noz pechiéz ? |1041 Et, s’il est ainsi que, pour la reverence et compassion d’icelles plaies, il ne delaisse a pechier, au moins s’en devroit il abstenir |1042 considerant que, se celuy le quel est innoscent en toutes choses a tant souffert, que le pecheur doit souffrir plus griefves plaines, sans nulle compareson. |1043 Et, se tu consideres ces choses en toy et tu congnois que Jesucrist, soit par tes pechiéz, indigné contre toy, adresse et met ton esperance envers sa doulce Mere, advocate des pecheurs, |1044 et luy fay reverence comme a la Mere de Dieu en luy demandant et requerant son aide par pleurs et lamentacions |1045 et croy et aies confidence certaines que, se tu perseveres incessamment, que la chose la quelle tu luy demanderas tu l’obtendras. |1046 Et la cause sy est car en icelle croit toute miseracion et pitié.

|1047 Et, avecques ce, luy est commis, de son office, donner et satisfaire aux povres et miserables pecheurs quelque chose que iceulx luy veulent demander et requerir. |1048 Et, s’il est ainsi que, par grande diligence, elle excerce et face aide communement envers tous, elle ne te pourra refuser, qui es seul. |1049 Et, se tu vois que quelques consolacion ne te soit donnee, congnoy que Dieu te ayme et te reçoit, mais il ne se veult pas encore manifester ne faire congnoistres, |1050 affin que tu congnoisses l’orreur, la laidure et la profundité de tes pechiéz et que tu ne soies pas ignorant de ta misere, et ceste chose te sera tres grant don de Dieu. |1051 Car saches de certain que la presumpcion d’aucuns ne plait point a Dieu, les quelz se reputent justes et qui approchent de Luy, Tres Hault et Souverain, ainsi come ilz feroient de leur familier amy, |1052 mais veult que quiconques, tant soit grant, qu’il soit ainsi comme ministre, se reputant comme rien, et en ceste maniere vienne et se represente devant le regart de Dieu |1053 en recordant la confusion de ses pechiéz, ayant grant crainte et luy faisant grande reverence. |1054 Et, de quelque estat que tu soies, tant soit grant, se nostre Dieu tres debonnaire te veult et daigne regarder de loing, ne le desprise pas, mais repute ce estre grant chose.

|1055 Et, pour cecy, confesse de plain cueur la magnitude de Dieu et la gravité et ma[e iii r]lice de tes pechiéz et dy : |1056 « Sire mon Dieu, je ne suis pas digne que tu entres en la maison de ma conscience ne que j’approche de toy en nulle maniere. » |1057 Je te dy que, se tu perseveres sans nulle cesse avoir recordacion de tes deffaultes et, en desplaisance et vraie humilité, tu te approches de luy, esperant de sa misericorde, il ne te verrra pas seulement mais te merra en ses tres secretes joyes. |1058 La quelle chose veulle donner celuy qui est benoit et tout puissant Seigneur au siecle des siecles. |1059 Amen.

|1060 Il est a savoir, en aprés, que le dyable d’enfer, avec ses malins esperitz, vient aux homes les quelz labourent a leur derraine heure, |1061 affin qu’il les tempte des articles de la foy plus que de nulle autre chose, |1062 car il ne met pas sy tost en la memoire du mourant la gloire et la joye des richesses ou des delices et autres biens de ce monde pour ce que le malade sçait bien que il ne les peut emporter avec luy, |1063 ne les honneurs pareillement, luy baille les suggestions fraudulentes en l’encontre de la foy, le cuidant decevoir, pour ce que elle est fondement de salut, |1064 affin que, quant le fondement sera destruit, que tout l’autre edifice des autres vertus soit destruit. |1065 Et fait tant que tous ses pechiéz luy revoque et met en la memoire affin que, en considerant la multitude et grandeur d’iceulx, il le puisse miserablement tirer en desesperance.

|1066 Pour ceste cause, ce n’est pas chose sceure amener en la recordacion de ses pechiéz le labourant a la derraine heure de sa fin, |1067 mais on luy doit donner cause de esperer avoir pardon de la divine misericorde, |1068 car, a cause de trop grant recordacion de ses pechiéz, il se pourroit desesperer. |1069 Et, aussi, on luy doit mettre en memoire la passion de Nostre Seigneur et aucuns biens |1070 les quelz, par la grace de Dieu, il a fais en sa vie et pour les quelz il peut esperer de la misericorde de Dieu.

|1071 Et, pour ce est ce bonne coustume entre les religieux que, quant aucun d’iceulx laboure en l’article de la mort et qu’ilz en ont congnoissance par aucun signe de dehors ; |1072 adonc, les freres, en quelque lieu qu’ilz soient, ou en la table ou en leur lit, se leveront et iront luy mettre en memoire le Symbole qui est chanté en l’eglise, c’est assavoir Credo in unum Deum, et cetera, |1073 et, pareillement, en recordant [e iii v] l’autre Symbole affin qu’ilz le conferment en la foy, le quel le dyable s’est efforcé le mettre hors.

|1074 Telz donc sont en tres grande et merveilleuse angoisse, car les malins espiritz les tourmentent de toutes pars et en toutes manieres |1075 quant ilz recordent et repliquent leurs mauvaises œuvres, leurs ditz, leurs cogitacions, les biens delaisséz et les maulx faitz et perpetréz et moult d’autres choses inenarrables.

|1076 Et, pour ce, dit saint Augustin : |1077 Presto erit dyabolus in ultimo die nostro, recitans verba professionis nostre |1078 et objiciens nobis quitquid mal fecimus et in quocumque loco et in quacumque hors et quid puimus facisse et non fecimus, |1079 c’est a dire que « Le dyable d’enfer sera tout appareillé en nostre derrain jour de reciter les paroles de nostre profession, |1080 opposant et improperant les maulx que nous avons faitz en quelque lieu que ce soit et en quelcunque jour et en quelcunque heure et pareillement les biens que nous avons peu faire et nous ne les avons pas faitz. »

|1081 Pour ce donc, ung chacun considere qu’il est de faire. |1082 Certainement, le souverain et plus sceur remede en ce est fermement croire sans doubter et esperer en la misericorde de Dieu plus qu’en la misere de tous les homes, |1083 car iceluy Jesucrist dit estre venu non pas pour les justes mais pour les pecheurs. |1084 Et ainsy appert tous les jours que la misericorde de Dieu veille, car il reçoit tous en en sa misericorde.

|1085 Et, pourtant, la paine de Jesucrist a plus pesé que tous les pechéz du monde. |1086 Et la justice de Dieu dort, car il ne punit point les pecheurs mais attent affin qu’il leur pardonne. |1087 Et, aprés ceste vie presente, sa justice veillera, car adonc il rendra a chacun ce qui est sien selon ses dessertes et merites. |1088 Mais en quelcunque heure que le pecheur se retournera de son pechié tant comme il est en ceste vie presente, il sera sauvé, |1089 car, ainsi comme nous desirons de jour en jour boire et menger, ainsi desire Nostre Seigneur nous sauver.

|1090 Et sachéz que la misericorde de Dieu est causee en trois manieres. |1091 Premierement, elle est causee de nature divine, a la quelle c’est chose propre estre misericordieuse. |1092 Secondement, elle est causee de longue acoustumance, |1093 car, depuis le commencement du monde jusques a la fin, il ne cesse eslargir et donner [e iiii r] sa misericorde. |1094 Et, de cecy, dit le prophete David : |1095 In eternum misericordia ejus, |1096 c’est a dire que « La misericorde de Dieu est sans fin ». |1097 Tiercement, elle est causee de sa grant puissance pour ce que Dieu est tout puissant et misricors.

|1098 Et, pour ce, nostre Mere saincte Eglise chante de luy en ceste maniere : |1099 Deus, qui omnipotenciam tuam parcendo maxime et miserando maniefstas, |1100 c’est a dire « O Sire Dieu, le quel donnes a congnoistre ta grande puissance en pardonnant aux pecheurs et mesmes en ayant pitié. » |1101 Il ne dit pas « Pere de puissance » ou « Pere de science » ou « Pere de justice » mais « Pere de misericorde » et « Dieu de toute consolacion », pour demonstrer et enseigner que nul ne se doit desesperer de sa misericorde et de sa benoite consolacion.

|1102 Il est escript que Lucifer a demandé la sapience et la puissance de Dieu et, pour ceste chose, il a esté degetté et plingé au parfons d’enfer. |1103 Adam a demandé la sapience de Dieu et, de ceste chose, il a esté privé et deceu. |1104 L’omme aprés la Nativité de Jesucrist, a demandé la misericorde de Dieu et il a eue et possidee come son propre heritage.

|1105 Et, pour ce, dit le Psalmiste : |1106 Misericordia tua, Domine, adjuvabit me, |1107 c’est a dire « O Sire mon Dieu, ta misericorde sera a mon aide. » |1108 Car Dieu dit : |1109 Misericordiam volo et non sacrificium, |1110 c’est a dire « Je veul misericorde » dit Dieu « et non pas sacrifice. »

|1111 Et devéz noter que, devant l’advenement de Jesucrist, quatre choses furent et ont esté a l’omme impossibles. |1112 La premiere est le ciel, car il ne recevoit nulle creature. |1113 La seconde est la mort, la quelle devoroit toutes choses et ravissoit les ames en enfer. |1114 La tierce chose estoit Dieu, qui ne reconcilioit point l’omme. |1115 La quarte estoit l’ange, le quel n’aymoit point l’omme et ne portoit au ciel nulles des ames des creatures humaines.

|1116 Mais Dieu s’est recordé de sa misericorde aprés sa Nativité et, adonc, misericordieusement a moderé toute durté et a fait a l’omme toutes choses paisibles, |1117 car, en Jesucrist, tant et sy grande pitié et misericorde a esté que en icelles a reconsilié l’omme. |1118 Et, pour ce, dit saint Paul : |1119 Cum inimici essemus Deo, reconciliati sumus per mortem Christi et placato Christo omnia sunt placabilia, |1120 c’est a dire que « Combien que nous fussons ennemys de Dieu, touteffois nous sommes reconsiliéz par la mort de Jesucrist, le quel appaisé, toutes choses nous sont paisibles ».

|1121 Mais, pour [e iiii v] entendre l’excellence de la misericorde de Dieu, tu dois savoir que elle est haulte, profunde et large.

|1122 De la premiere, donc, qui est haulte, il est dit qu’elle tent et monte jusques au ciel et fait remunerer les saintz selon leurs merites. |1123 Et, de ceste, est dit par le Psalmiste : |1124 Magnificata est usque ad celos misericordia tua, |1125 c’est a dire que « La misericorde de Dieu est magnifiee jusques aux cieulx ».

|1126 Elle est profunde, car elle est descendue jusques en enfer et en a osté et admené les saintz Peres, qui en le lieu estoient detenus, |1127 selon ce que la Psalmiste nous dit : |1128 Misericordia tua magna est super nos et eruisti animas nostras ex inferno inferior, |1129 c’est a dire que « La misericorde de Dieu est grande sur nous, car elle a osté noz ames du plus base d’enfer ».

|1130 Elle est large et tant grande que elle est estendue par tout le monde, |1131 car il est escript au Psalmiste : |1132 Misericordia tua, Domine, plena est terra, |1133 c’est a dire « O Sire, la terre est plaine de ta misericorde. »

|1134 Par ce, on peut considerer que la misericorde de Dieu est sy multipliante qu’elle ne sçairoit estre nombree. |1135 Et, de cecy, dit le Psalmiste : |1136 Misericordie ejus non est numerus, |1137 c’est a dire qu’« Il n’est point de nombre de la misericorde de Dieu ».

|1138 Et, ainsi, come la naturelle proprieté du feu est eschaufer, ainsi est la naturelle proprieté de Dieu estre piteux et espargner. |1139 Et, pour ce que propre chose est a Dieu estre piteux, aussi estrange chose est a Dieu de punir et chose contre sa voulenté et tardive. |1140 Et, tout ainsi que la mouche a miel a de propre nature et de son office faire le miel et aussi qu’elle point quant elle est molestee et que ce luy est chose estrange, ainsi est il de Dieu. |1141 Quant il donne le miel de sa misericorde, il fait son office et fait ce qui est de sa propre nature.

|1142 Pareillement, quant il adjouste l’esguillon de sa justice, il en fait l’office, la quelle chose luy est estrange et contre sa voulenté, |1143 car il ne punit pas de legier mais envis. |1144 Et, pour ce, dit saint Jehan Crisostome : |1145 Illud quod homo facit contra naturam tarde facite. |1146 Sic Dominus facit opus misericordie sue quia illud est secundum naturam suam et tarde punit et invite et cum magno dolore compellitur peccatores dampnare, |1147 c’est a dire que « La chose que l’omme fait contre sa nature, il la fait a tart. |1148 Ainsi Dieu fait l’œuvre et envis et est contraint avec grant douleur dampner [e v r] les pecheurs », |1149 car, de certain, il ne luy fait pas tant de mal de l’offence des pecheurs a luy faicte qu’il luy fait mal que, par leurs desmerites, il soit contraint violentement les perdre et dampner, |1150 car, de sa nature, il veult tous les hommes estre sauvéz.

|1151 La misericorde de Dieu, donc, est sy grande que elle est trouvee par tout lieu, |1152 car, se nous sommes au ciel, c’est de la misericorde de Dieu, la quelle nous sauve. |1153 Et, a ce propos, le Psalmiste dit : |1154 Domine, in celo misericordia tua, |1155 c’est a dire « O Sire, ta misericorde s’estent jusques au ciel ! » |1156 Et de cecy dit Isaÿe : |1157 Expectat nos Dominus ut misereatur nostri, |1158 c’est a dire que « Nostre Seigneur nous attent affin qu’il ait pitié de nous ».

|1159 En expurgatoire sa misericorde est nous delivrant.  |1160 Et de cecy dit l’Ecclesiastique : |1161 Liberasti me a pressura flamme que circumdedit me, |1162 c’est a dire « Tu m’as delivré, Sire, de l’oppression de la flamme la quelle m’a environné. »

|1163 En enfer, sa misericorde y est appaisante, |1164 car les pecheurs ne sont punis synon que selon ce qu’ilz ont desservi. |1165 Par les quelles choses on peut veoir que Dieu n’omblira point a estre piteux et sy ne tendra en son ire eslargie ses misericordes.

|1166 Et dois noter qu’il sont trois choses les quelles Dieu ne peut faire. |1167 C’est assavoir, pour la premiere, qu’il ne peut denyer pardon a celuy qui le demande humblement. |1168 Pour la seconde, il ne peut punir la creature innoscente. |1169 Pour la tierce, il ne peut denyer estre misericors et piteux.

|1170 Pour les quelles choses dessus dites, il est appellé en son nom misericors et piteux et juste, |1171 selon ce que nous enseigne le Psalmiste quant il dit en ceste maniere : |1172 Misericordia tua, Domine, adjuvabat me, |1173 consolaciones tue letificaverunt animam meam, |1174 c’est a dire « O Sire Dieu, en toutes choses ta misericorde m’a aidé |1175 et tes bonnes consolacions ont esjouy mon ame. »

|1176 Car la misericorde de Dieu sauve le condampné quant et ainsi comme il luy plaist. |1177 Et, que ceste chose soit vraie, il appert en Marie Magdalene, la quelle Dieu, nostre doulx Createur, a sauvee par quatre parolles, c’est assavoir : |1178 Remittuntur tibi peccata multa, |1179 c’est a dire « Moult de pechiéz te sont remis et pardonnéz. » |1180 Semblablement, il sauva David par trois sillaibes quant il dit : |1181 Peccavi, |1182 c’est a dire : « J’ay pechié. » |1183 Et dois savoir et entendre [e v v] que ces trois sillaibes, c’est assavoir Peccavi, valent tant avec contricion que, par icelles, la flambe du cueur monte jusques au ciel. |1184 Pareillement, il a sauvé saint Mathieu par quatre sillaibes, |1185 c’est assavoir Sequere me, |1186 c’est a dire « Ensuy moi. » |1187 Et, avec ce, il a sauvé saint Pol par cinq paroles quant il dit : |1188 Domine, quid me vis facere, |1189 c’est a dire « O Sire, quelle chose veulx tu que je faces ? » |1190 Et, aussi, il a sauvé saint Pierre par ung petit de larmes quant il yssit hors de la compaignie des Juifz et qu’il commença a pleurer amerement.

|1191 Et, pour ce, dit le prophete : |1192 Melior est misericordia tua super vitas, |1193 ideo labia mea laudabunt te, |1194 c’est a dire « O Sire Dieu, ta misericorde vault mieulx sur toutes les vies des hommes. |1195 Pour ce, ma bouche te donnera louenge. »

|1196 Et est a noter que trois gerres, c’est a dire trois manieres, de pechiéz sont, qui sont sur tous les autres principaulx, c’est assavoir orgueil, luxure et avarice. |1197 Et du premier, c’est assavoir de orgueil, pecha Saül, qui est dit Paul, le quel en toute et sur toue maniere persecutoit l’Eglise de Dieu. |1198 Et du second, c’est assavoir de luxure, pecha David, le quel commit doublement adultere. |1199 Du tiers, c’est assavoir de avarice, pecha saint Mathieu, le quel estoit changeur, en tendant a avarice par art et desordonné prouffit.

|1200 Touteffois, Dieu a esté appaisé par la penitance et contricion d’iceulx en telle maniere qu’il ne leur a pas seullement pardonné leurs pechiéz |1201 mais, avecques ce, merveilleusement les a colloquéz, accumuléz et assembléz en ses dons par sa grant misricorde. |1202 Car Paul, le grant persecuteur de l’Eglise, a fait grant predicateur et porteur de son nom tres loyal ; |1203 David, fornicateur et homicide, a fait prince des prophetes ; |1204 Mathieu, avaricieux et couvoiteux, a constitué apostre et premier evangeliste. |1205 Et, en ces choses, il a demonstré sa misericorde.

|1206 Pour ces causes, l’Evangile de Mathieu, les Pseaulmes de David et les Epistres de saint Paul sont plus souvent leues et recordees en l’Eglise |1207 a demonstrer que la misericorde de Dieu est sy grande que quelconque pecheur, tant soit parfont en coulpe, s’il veult se convertir et demander et requerir humblement la misericorde de Dieu, qu’il ne l’obtienne.

|1208 Et, en nulle maniere, le pecheur ne se doit desesperer quant [e vi r] il considere et qu’il regarde iceulx devant ditz avoir esté telz en coulpe |1209 et, aprés, par la misericorde de Dieu, comme ilz ont esté montéz et mis en sa grace en ce siecle present |1210 et, le temps le quel leur estoit ad venir, come ilz ont esté et sont colloquéz en sa gloire. |1211 Et cecy est la cause que David, aprés qu’il eust fait le Psaultier, composa ceste pseaulme, c’est assavoir Miserere mei, Deus, la quelle pseaulme est de remission. |1212 Et icelle a voulu mettre entre les autres cinquantiesme, car ainsi comme l’an cinquantiesme – c’est a entendre l’an jubilé – est an de remission, c’est a dire l’an par le quel les pechiéz sont pardonnéz, |1213 en ceste maniere et par ceste exemple, les pechiéz venielz sont effacéz de ceulx qui dient ceste pseaulme Miserere mei, Deus avec contricion de cueur et confession de bouche.

|1214 Et dois noter que misericorde est en Nostre Seigneur sy grande qu’elle fait venir du ciel a nous celuy qui tant misericordieusement nasquit pour nous.

|1215 Et, pour ce, dit Lucas Dieu estre venu a nous pour esperance de utilité, ainsi qu’il est escript : |1216 Spiritus Domini eo quod unxit me, |1217 c’est a dire que « L’esperit de Dieu est venu en terre affin que je fusses oingt de sa misericorde ».

|1218 Et, premierement, il est venu pour la consolacion des povres, car il a voulu nasquir povre. |1219 Secondement, pour la guerison et medecine des contritz, c’est a dire des bleciéz par pechié. |1220 Tiercement, pour la delivrance des prisonniers, c’est a dire des ames des saintz Peres et autres detenues en la prison d’enfer. |1221 Quartement, pour l’inluminacion des non enseignéz, c’est a dire de ceulx les quelz doivent congnoistre les merveilles de Dieu. |1222 Quintement, pour la remission des pechiéz, des quelz doit estre demandee misericorde. |1223 Sixtement, pour faire le paiement de la debte de toute nature humaine. |1224 Septiesmement, pour retribuer le merite de ceulx et celles qui accompliront les commandemans.

|1225 En ces choses, donc, est moult declairee la grande misericorde de Dieu, |1226 car, selon ce que saint Augustin nous dit : |1227 Venit ad nos celestis negociator accipere contumelias nostras et dare nobis honores, subicere pro nobis mortem et dare nobis vitam sempoternam, accipere pro nobis ignominiam et dare nobis gloriam, |1228 c’est a dire que « Le negociateur celestiel est venu a nous pour prendre notre honte [e vi v] et confusion et nous donner ses honneurs, se submettre a la mort et nous donner vie eternelle, prendre pour nous toute ignomineuseté et reproche pour nous donner sa gloire ».

|1229 Et, semblablement, dit saint Gregoire : |1230 Christus venit pro nobis in terra natus. |1231 Adversa petens, propsera contempnens, opprobria amplectans, gloriam fugiens, nova docens, mira faciens, prava nostra tolleravit, |1232 c’est a dire que « Jesucrist est venu en terre estre nasqui pour nous, |1233 endurant choses adverses et contraires, contempnant les prosperitéz, embrachant toutes opprobres et injures, fuyant toute gloire mondaine, enseignant choses nouvelles, faisant miracles et choses merveilleuses, et toutes noz faultes a portees et soustenues ».

|1234 Et, pour ceste cause, dit saint Bernard : |1235 Necesse fuit ut Christus ad nos veniret ut, in nos per fidem habitans, illuminaret cecitatem nostram |1236 et, in nobis manens, adjuvaret infirmitatem nostram et, pro nobis stans, fragilitatem nostram protegeret, |1237 c’est a dire qu’« Il fut necessaire que Jesucrist vensist a nous affin que, icelluy habitant en nous, enluminast nostre aveuglement |1238 et que, luy demourant avec nous, supportast et aydast nostre enfermeté et, estant pour nous, il deffendist nostre fragilité ».

|1239 Et, pour ces causes, dit saint Ambroise : |1240 Debent omnes christiani ad Christum confidenter accedere et in ejus misericordia indubitanter esperare, |1241 c’est a dire que « Tous crestiens doivent hardiment et confidentement approucher a Jesucrist et sans nulle doubte esperer en sa misericorde ». |1242 Et dit, aprés, que sa misericorde est sy grande que tous remedes peuent en icelle estre trouvéz.  |1243 Et la cause sy est pour ce qu’il a soustenu toutes choses pour nous.

|1244 Et s’ensuyt, se tu demandes estre gueri d’une plaie, c’est a dire d’aucun pechié estant en ton ame, va a luy, car il est vray medecin. |1245 Se tu es en chaleur par aucune fievre, il est affreschissement et refrigeracion.  |1246 Se tu es aggravé d’aucun pechié, il est justice. |1247 Se tu es indigent et as necessité de ayde, il est vertu.  |1248 Se tu es paoureux de la mort, icelluy est vie.  |1249 Se tu desires le ciel, il en est la voie. |1250 Se tu fuys tenebres, il est toute lumiere.  |1251 Et, se tu quiers viande, il est nourrissement. |1252 Par les quelles parolles, tu peux congnoistre que tant et telle est la [f i r] misericorde de Dieu que nul, en luy se confiant, ne peut en quelque maniere perir.

|1253 Pense donc et considere maintenant que ceulx qui sont en enfer aymeroient au monde mieulx une petite espasse de heure affin qu’ilz impetrassent en brief temps la misericorde de Dieu |1254 en disant tant seulement « Helas, helas, quelz et quantz pechiéz nous avons commis » |1255 ou en disant « O Sire, aies pitié de moy, povre pecheur » |1256 qu’ilz n’aymeroient toutes les richesses ou facultéz ou administracions de tout le monde. |1257 Car ilz sçaivent bien que leur confidence la quelle ilz mettroient en Nostre Seigneur les sauveroit, la quelle chose ne feroit pas toutes les possessions du monde.

|1258 Mais escoute ce que dit saint Martin au dyable : |1259 Si misericordiam Dei humiliter implores, eam feliciter consequeris, |1260 c’est a dire « Se tu requerois humblement la misericorde de Dieu, il te la donneroit joyeusement. » |1261 Et, adonc, respondit le dyable qu’il esliroit plustost demourer en enfer perdurablement. |1262 Pour la quelle chose est donné a entendre |1263 que, aux hommes labourans a l’eure derraine et les quelz sont a mourir, le dyable, en tant qu’il peut, leur met en memoire les suggestions et temptacions de desesperance |1264 affin que, en celle heure, ilz n’esperent point en la misericorde de Dieu.

|1265 Et, ainsi, comme le dyable, par sa malice, veult et desire tous les hommes estre dampnéz, |1266 au contraire, Dieu, par sa souveraine bonté et misericorde, veult tous les hommes estre sauvéz, |1267 car, certainement, la misericorde de Dieu est greigneure pour nous deffendre que n’est la malice du dyable pour nous dampner. |1268 Et ceste cause est a Dieu moult convenable, car il est appellé Jesucrist, c’est a dire « Roy Salvateur », |1269 car il a fait son peuple sauf de leurs pechiéz, c’est assavoir du pechié originel, actuel et veniel.

|1270 Et dois savoir que, pour guerir ces pechiéz, Jesucrist a receu pour nous trois manieres de playes. |1271 Premierement la playe du costé, affin qu’il guerist du pechié originel print sa naissance. |1272 Secondement la playe des mains, affin qu’il guerist du pechié actuel, car operacion est signifiee par les mains. |1273 Tiercement la playe des piéz, affin qu’il guerist du pechié veniel, |1274 car l’affection et voulenté est signifiée par les [f i v] piéz.

|1275 En aprés Dieu est appellé Emmanuel, qui vault autant a dire come « Dieu soit avec nous », |1276 car il est avec nous generalement par sa puissance, |1277 car il est escript : |1278 Portans omnia verbo virtutis sue, |1279 c’est a dire que Dieu « porte toutes choses par la parole de sa vertu ». |1280 Il est avecques nous especiallement par grace, car il est escript : |1281 Ubi duo vel tres congregati erunt in nomine meo, ibi in medio eorum sum, |1282 c’est a dire que « En quelque lieu que deux ou trois seront assembléz en mon nom, je seray au meilleu de eulx ».

|1283 Il est avecques nous singulierement par union de nature, car il est escript : |1284 Verbum caro factum est et habitavit in nobis, |1285 c’est a dire que « La parole de Dieu est faicte chair et a habité en nous ». |1286 Et dois noter que ce mot « parole » est prins pour « le Filz de Dieu ». |1287 Et, quant il dit que elle « est faicte chair », il est a entendre qu’il « a pris nostre humanité ».

|1288 Il est avecques nous sacramentellement par le delaissement qu’il nous a fait de son corps.  |1289 Et de cecy, il est escript : |1290 Qui manducat meam carnem et bibit meum sanguinem, in me manet et ego in illo, |1291 c’est a dire « Qui mengue ma chair et boit mon sang, il demeure en moy et moy en luy. »

|1292 Et dois savoir que Dieu, du quel la misericorde est si grande a ceulx qui le craingnent a fait en nous trois œuvres.

|1293 La premiere œuvre est quant il ordonna le ciel pour nous donner aspiracion, la terre pour germer fruit, le soleil et la lune pour nous donner lumiere, la mer et l’air pour nous donner nourrisement.

|1294 Toutes ces choses a donnees a l’omme, pour le quel ilz sont faictes, et non pas seullement ceulx cy mais, toutes celles que Dieu a eues, il nous les a donnees, |1295 c’est assavoir son royaulme en possession, ainsy que luy mesmes dit : |1296 Venite ad me, possidete regnum vobis paratum a constitucione mondi, |1297 c’est a dire « Venéz a moy et possidéz le royaulme le quel vous est apparillé dés la constitucion du monde. »

|1298 Il nous a donné son corps pour refection, car il dit : |1299 Caro mea vere est cibus, |1300 c’est a dire « Ma chair est la vraie viande. »

|1301 Il nous a donné son sang en oblacion, selon ce qu’il est escript : |1302 Lavit nos a peccatis nostris in sanguine suo, |1303 c’est a dire : « Il nous a lavéz de noz pechiéz en son sang. »

|1304 Il nous a donné son ame en redempcion, car il dit : |1305 Animam meam pono pro ovibus meis, |1306 c’est a dire [f ii r] « Je metz mon ame pour mes ouailles. »

|1307 Il nous a donné sa deïté pour fruicion. |1308 Et de ce est il escript : |1309 Hec est vita eterna ut credant te solum verum Deum, |1310 c’est a dire « Vecy la vie eternelle a ceulx qui croient toy seul estre vray Dieu. »

|1311 En ces choses est la grande misericorde de Dieu congnue et manifestee.

|1312 La seconde œuvre que Dieu a faicte en nous est de la redempcion.

|1313 Certainement, nostre Dieu a fait toutes choses par nombre, par poix et par mesure, excepté l’œuvre de nostre redempcion, |1314 car tu dois savoir qu’en ce il n’a point gardé le nombre, |1315 c’est assavoir qu’il ait donné une goute ou deux ou trois de son sang, combien qu’il fust ainsi que une goutte tant seulement fust et estoit suffisante pour la redempcion de tout le monde. |1316 Ne aussi il n’a point gardé le poix, c’est assavoir qu’il en espandit une once ou une livre tant seulement. |1317 Ne il n’a point gardé mesure, c’est assavoir qu’il en mesurast ung calice ou deux, mais a tout baillé en païement. Il a tout donné, il a tout espandu. |1318 Et, a ce propos, dit le Psalmiste : |1319 Copiosa apud eum est redempcio, |1320 c’est a dire « La redempcion est envers Dieu tres habondante », |1321 car il a racheté Israhel de toutes ses iniquitéz.

|1322 Ainsi donc, Jesucrist, en nous rachetant, n’a pour luy rien retenu, mais pour nous a tout espandu et luy mesmes pour nous s’est anichilé et anyenti. |1323 Il a esté perché jouxte le cueur pour demonstrer et declairer qu’il a esté en ses benefices franc et large. |1324 Et, ainsi come le vesseau perché ne retient rien, ainsi Jesucrist en nous rachetant misericordieusement n’a pour luy rien retenu.

|1325 Il a esté crucifié par les piéz pour demonstrer qu’il a porté le poix de tous noz pechiéz, |1326 car il est escript : |1327 Vere langores nostros ipse tulit et dolores nostros ipse portavit, |1328 c’est a dire « Certainement nostre Dieu a souffert noz langueurs et iceluy a porté noz douleurs. »

|1329 Il a esté aussi estendu en la croix a demonster que sa misericorde et son amour, par les quelz il nous a rachetéz, demourront eternellement, |1330 car l’Apostre dit en ceste maniere : |1331 Quis nos separabit a caritate Christi ? |1332 Tribulacio an angustia an persecucio ? |1333 c’est a dire « Qui sera ce qui nous separera de la charité Jesucrist ? |1334 Sera ce tribulacion ou angoisse ou persecusion ? »

|1335 Ainsi come s’il voulsist dire et respondre que nulle chose ne nous pourroit [f ii v] separer de la charité de Jesucrist, |1336 car il est escript : |1337 Ecce, ego vobiscum sum omnibus diebus usque ad consummacionem seculi, |1338 c’est a dire « Certainement, je suis avecques vous jusques a la fin et consummacion du monde. » |1339 Et en cecy est plus grande misericorde de Dieu.

|1340 La tierce operacion est de glorificacion, la quelle sera consummee et acomplie aprés ceste vie presente, |1341 quant nous serons glorifiéz, l’ame avec le corps, et que nous regnerons perpetuellement et eternellement avec Dieu.

|1342 Et adonc sera jour sans nulle nuyt, lumiere sans tenebres, joyes sans fin, ainsi comme l’Apostre dit : |1343 Quod oculus non vidit nec auris audivit nec in cor hominis ascendit que preparavit Deus diligentibus se, |1344 c’est a dire que « Oeul oncques ne veist ne oreille ne ouyt ne sy ne monta en cueur de homme les choses les quelles Dieu a appareillees a ceulx qui l’ayment ».

|1345 Et ceste glorificacion de l’omme commença Dieu quant il le fit a sa similitude. |1346 Et, a ce propos, dit le Psalmiste : |1347 Signatum est super nos lumen vultus tui, Domine. Dedisti leticiam in corde meo, |1348 c’est a dire « O Sire Dieu, la lumiere de ton visage est signee sur nous et, de ce, tu as donné lyesse a mon cueur. »

|1349 Et dois noter que Dieu n’a pas voulu avoir parenté avec nature angelique mais avec nature humaine, |1350 la quelle il a plus aymee |1351 et la quelle il a composee a son ymage et similitude |1352 et la quelle, aprés toutes ces choses, a tant seulement voulu racheter, |1353 car saint Paul dit : |1354 Nusquam angelos comprehendit sed semen Abrahe, |1355 c’est a dire qu’« Il n’a pas prins fourme d’ange mais a prins la semence de Abraham ».

|1356 Et, par ceste chose, on peut considerer qu’il y a entre Dieu et homme greigneure affinité, greigneure consanguinité de lignage et greigneure fermeté de cognacion et parenté que entre Dieu et les anges. |1357 Et, en cecy, la tres grande misericorde de Dieu est manifestee.

|1358 Saint Bernard dit en ceste maniere : |1359 Securum accessum habemus Matrem. |1360 Filius obtendit Patri latus et vulnera, et Mater obtendit Filio pectus et ubera, |1361 c’est a dire que « Nous avons sceur approchement envers Dieu pourtant que nous avons son Filz devers luy et envers le Filz nous avons sa Mere. |1362 Le Filz demonstre au Pere ses playes et son costé, et la Mere monstre a son Filz sa poeterine et [f iii r] ses mammelles ». |1363 Par quoy il est impossible que, en lieu ou il y a tant d’enseignes de pitié, que aucune requeste y peut estre reboutee.

|1364 O bon Jesus, combien et comment as tu doulcement conversé avec les hommes ! |1365 Quantz grans dons habondamment leur as tu eslargis, dures paroles, durs batemens et tres durs tourmens de la croix as tu voulu endurer pour les homes !

|1366 Certainement, Dieu a voulu estre tempté pour nous affin qu’il sourmontast toutes les temptacions du dyable. |1367 Il a souffert affin qu’il asubjectist toutes passions.  |1368 Il a souffert mort affin qu’il recouvrast la vie eternelle. |1369 Il a eu fain affin qu’il nous refectionnast. |1370 Il a eu soif affin que a nostre soif il administrast utile boisson. |1371 Il a esté tempté affin qu’il nous delivrast de toutes les temptacions du dyable.  |1372 Il a esté demoqué affin que nous fussons delivréz de moquerie dyabolique.  |1373 Il a esté lié affin qu’il nous deslyast et mist hors du nou du dyable d’enfer. |1374 Il s’est humilié affin qu’il nous eslevast et exaltast au ciel.  |1375 Il a esté despoullé affin qu’il couvrist la nudité de la premiere transgression par indulgence. |1376 Il a prins couronne d’espines affin qu’il nous donnast les fleurs de paradis les quelles nous avyons perdues. |1377 Il a esté pendu au bois de la croix affin qu’il adnichillast par le bois et mist a nyent la concupiscence et le desir du premier parent. |1378 Il a esté abrevé de fiel et de vin aigre affin qu’il menast et conduysist l’omme a la terre celestielle, c’est a dire a l’Eglise triumphante, habondante de lait et de miel. |1379 Il a receu mortalité affin qu’il fust, aprés ces choses avecques nous, participant son immortalité.  |1380 Il a esté enseveli affin qu’il donnast benediction a nos sepultures. |1381 Il est ressuscité de mort affin qu’il nous demonstrast estre ressuscitéz au jour du Jugement et affin qu’il nous rendist la vie eternelle. |1382 Il est monté aux cieulx pour nous ouvrir les portes celestielles.  |1383 Il syet a la dextre de Dieu le Pere affin qu’il essausse les prieres de ceulx qui croient en luy et affin qu’il les offre a Dieu le Pere avecques les playes les quelles il a souffertes pour nous. |1384 Il a prins nostre povreté, temptacion, tristesse, douleur et mort affin que, en ces choses, il fust semblable a nous et affin qu’il congneust [f iii v] mieulx noz miseres |1385 et affin que, plus facilement et legierement, il feust encliné a estre doulz, piteux et misericordieux.

|1386 Et appartenoit qu’il fust en toutes choses semblable a nous, qui sommes ses freres, affin qu’en toutes choses il feust misericordieux, |1387 car, en ce qu’il a souffert, iceluy puissant a esté tempté affin que luy existent secourust misericordieusement a ceulx qui sont temptéz et que justement il leur feust en ayde. |1388 Au quel est honneur, vertu et gloire par les infinis siecles des siecles. |1389 Amen.


743 Note : Paul, Épitre aux Hébreux, 11, 6.
759 Note : L’idée se trouve chéz Augustin, De vera religione, mais sa formulation est chéz Thomas, Summa Theologiae, I, II, LXXI.
762 Note : Isidore de Séville, De summo bono, III, 4 (De tolerentia divine correptionis).
766 Leçon non conservée : estre manque
784 Note : Paul, Épitre aux Romains, 10, 10.
793 Note : Paul, Épitre aux Romains, 10, 10.
808 Note : Léon Ier, De Nativitate domini, XXVII, 3
816 Note : Léon Ier, De Nativitate domini, XXVII, 3
821 Note Bible de Jérusalem, Écclésiastique, 27, 6
824 Note Job, 23, 10
827 Note : Pierre, Première lettre, 1, 7
830 Note Livre de Tobie, XII
834 Leçon non conservée : non sustineamus – Note : Job, 2, 10
839 Note Psaumes, 6, 2
842 Note Matthieu, 26, 38
845 Note Marc, 15, 34
848 Note Ésaïe, 54, 7
849 Leçon non conservée : meam ad t
859 Leçon non conservée : cribaret – Note : Luc, 22, 31
896 Note : Aristote, Éthique à Nicomaque, II, 2, 123
900 Note Jean, 21, 18
901 Leçon non conservée : alins te
902 Leçon non conservée : ou u vouloies
908 Note : Paul, Première Épitre aux Corinthiens, 3, 2.
917 Note Matthieu, 17, 4
920 Note Matthieu, 26, 72
928 Leçon non conservée : sublevamen – Note : Ecclésiaste, 4, 10
934 Leçon non conservée : consilii – Note : Actes des Apôtres, 5, 41
938 Note : Paul, Deuxième Épitre aux Corinthiens, 2, 7
946 Note Ecclésiaste, 3, 1.
979 JNote : ean, Première lettre, 4, 1.
983 Note : Le passage cité renvoie en réalité à Bernard de Clairvaux, Sermones in Cantica canticorum, XLIX.
987 Note : Augustin, De anima et spiritu, XXVII.
1002 Note Job, 7, 14
1008 Note : Prudence, Cathemerinon, Hymnus 6.
1018 Note : Bonaventure, Sermones de decem praeceptis (III), Stimuli Amoris, XII.
1039 Leçon non conservée : en tou cœur
1077 Note : Augustin, Sermo contra judaeos, Parganos et Arianos.
1095 Note Psaumes, 135, 6.
1099 Note Oratio Dominicae XXVI (prière du Xe dimanche après la Pentecôte).
1106 Note Psaumes, 94, 18
1109 Note Matthieu, 12, 7
1119 Note : Paul, Épitre aux Romains, 4, 10
1124 Note Psaumes, 57, 11
1128 Note Psaumes, 86, 13
1132 Note Psaumes, 119, 64.
1136 Note Psaumes, 147, 5
1145 Note : Jean Chrysostome, Homélie XLVI sur l’évangile selon saint Matthieu, XXIII.
1154 Note Psaumes, 35, 6.
1157 Note Ésaïe, 30, 18.
1161 Note Bible de Jérusalem, Ecclésiastique, 51, 6.
1172 Note Psaumes, 94, 18
1178 Note Luc, 7, 47
1181 Note Deuxième livre de Samuel, 12, 13
1185 Note Matthieu, 8, 22
1188 Note Actes des Apôtres, 9, 6.
1192 Note Psaumes, 63, 4-6.
1213 Note Psaumes, 51, 2
1216 Note Luc, 4, 18
1227 Note : L’idée se trouve chéz Augustin, mais le texte cité est celui de Jacques de Voragine, Legenda aurea, I (qui attribue le passage au pape Léon)
1230 Note : Grégoire Ier, Moralia in Job, II, XXXIV
1235 Note : Bernard de Clairvaux, Sermo VII de Advenu Domini
1240 Note : Référence à Ambroise non identifiée
1259 Note : Référence à Martin non identifiée
1278 Note : Paul, Épitre aux Hébreux, 1, 3
1281 Note Matthieu, 18, 20
1284 Note Jean, 1, 14
1290 Note Jean, 6, 57
1296 Note Matthieu, 25, 34
1299 Note Jean, 6, 5
1302 Note Apocalypse, 1, 5
1305 Note Jean, 10, 15
1309 Note Jean, 17, 3
1319 Note Psaumes, 129, 7
1327 Note Ésaïe, 53, 4
1331 Note : Paul, Épitre aux Romains, 8, 35
1337 Note Matthieu, 28, 20.
1343 Note : Paul, Première Épitre aux Corinthiens, 2, 9.
1347 Note Psaumes, 4, 7.
1354 Note : Paul, Épitre aux Hébreux, 6, 13
1356 Leçon non conservée : greigneure affinite greigneure
1359 Note : Bernard de Clairvaux, Homiliae super Missus est
1384 Leçon non conservée : seblable