[Cincq temptacions]

[151v] |153 Il n’est pas a doubter que ceulx qui labeurent a l’article de la mort n’ayent pluseurs grandes temptacions et les [152r] nonpareillez qu’ilz ayent oncques eu par avant en plaine vie, |154 entre les quelles j’en trouve cincq principallez.

|155 La premiere est de foy, |156 pour ce que aussi que foy est le fondement de nostre salut.

|157 Tesmoing l’Apostre qui dit, parlant du salut : |158 « Nul ne peut mettre autre fondement en nostre salut que foy. » |159 Et saint Aujustin dit : |160 Fides est bonorum omnium fundamentum et humane salutis inicium |161 « Foy est le fondement de tous biens et le commencement de humain salut ». |162 Et, pour ce, dit de rechief l’Apostre, Ad Hebreos, .xio. capitulo : |163 Sine fide impossible est placere Deo |164 « Il est impossible que sans foy nul puisse a Dié plaire ». |165 Et saint Jehan dit : |166 « Celuy qui ne croit est desja jugé ».

|167 Comme doncques foy soit de si grant auctorité, vigueur et excellence que sans elle nul ne puisse obtenir salut, quant vient que l’omme labeure au derrenier de ses jours, [152v] |168 le dyable vient et se parforce a toute puissance de le troubler et faire varier en elle |169 ou, au moins, luy apporte et met au devant faulces erreurs pour le decevoir. |170 Et, pour ce, tout bon crestien, quant se voit ainsi estre tenté, doit incontinent ramentevoir et dire continuellement, tant que possible luy est, les .xii. articles de la foy, qui sont contenus au grant Credo in Deum et se fermer en eulx.

|171 Puis encore, pour ce que les maladies aggriefvent et troublent aucuneffoys si tres fort les malades qu’ilz n’ont pas advisement de les ramentevoir, |172 ceulx qui sont a l’entour les en doivent adviser et sur ce leur donner consolacion, |173 ne seullement touchant les dis articles mais aussi touchant toutes autres escriptures sainctes et bons exemples selon que Dieu leur administre, |174 car, si tost que l’omme, [153r] quel qu’i soit, commence errer en aucunne des susdictes, tant plus tost il commence devoier de la voye et de salut.

|175 Non pour quant, ja soit ce que le diable soit tousjours prest a tout effort de troubler l’homme et decevoir, |176 toutesfois il n’a sur luy nulle puissance tandis qu’il usera de franc vouloir et sera bien disposé en soy, si non en tant qu’il luy vouldra donner consentement. |177 Et, pour ce, dit l’Apostre : |178 « Ne vueillez pas donner lieu au dyable ». |179 Et saint Jaques dit : |180 « Faites resistence au dyable et il s’en fuyra de vous ».

|181 Et, pourtant, nul bon chrestien ne doit jamais doubter nullez ilusions ne menaces ne losenges diabolicques ne aussi donner a elles aucun consentement, |182 car toutes sont mençongeuses, mesmement pourtant que le dyable est pere de mençonge, |183 mais doit perseveramment et de bon couraige demourer en la foy et [153v] unité et vraye obeïssance de nostre Mere sainte Eglise et en elle desirer mourir.

|184 Et aussi est grandement bon et prouffitable que ceulx qui demeurent a l’entour des malades ou aucun d’eulx die le Credo in Deum, ou quel sont contenuz les .xii. articles de la foy, |185 a haulte voix |186 ou au moins que les manieres le puissent ouyr et appliquier leur couraige a la foy et delaissier toutes vaines ymaginacions et toutes temptacions desquellez seroient assailliz, |187 car, en ce faisant, le dyable le tenne et le desprise et desdaigne tellement que, quant voit qu’il ne peut riens prouffiter, il s’en va par desdaing.

|188 Puis encores les doit on advertir de la foy de Abraam, de Ysaac et de Jacob |189 et aussi d’aucuns payens si comme de Job, de Raab, |190 de Achiol et d’autres semblales, |191 puis encore comme, par foy, les apostres, les martirs, les confesseurs et les vierges [154r] ont vaincu les royaulmes en ce siecle et a la parfin obtenu le royaulme des cieulx. |192 Saint Bernart dit : |193 Fides est primogenita inter virtutes |194 « Foy entre les vertus est la premiere engendree ». |195 Et encores plus te diray : |196 Beatior fuit Maria precipiendo fidem Christi quam carnem Christi |197 « La benoiste Vierge Marie fut plus benoiste de la foy qu’elle eut de Jhesucrist que de la char de luy ».

|198 Foy est donc de si grant efficace que par elle communement tous les anciens et pareillement ceulx qui de present sont ont moult pleu et plaisent tousjours a Dieu, |199 car, comme il est desja dit : |200 Sine fide impossibile est placere Deo |201 « Il est chose impossible que sans foy nul puisse plaire a Dieu ».

|202 Le prouffit que nous acquerons de foy est double. |203 L’ung est que, |204 si come le Sauveur tesmoigne en son euvangille : |205 Omnia possibilia sunt credenti |206 « Toutes choses sont possibles a celuy qui croit ». |207 L’autre est que vraye [154v] foy impetre toutes choses. |208 Ce mesme aussi tesmoigne le Sauveur, disant : |209 Et iterum quodcumque orantes pecieritis credite quod accipietis |210 « Toutes choses que vous demanderez par voz oroisons vous obtiendréz se vous avéz foy et creance » |211 et se vous dittez a aucune montaigne que elle se transmue, elle se transmura, |212 si comme firent les montaignes de Caspii, qui se assemblerent et conjoindirent a la priere et oroyson d’Alexandre.


151 Note : Paul, Épitre aux Philippiens, 1, 23
152 Note : Suivent 10 lignes en blanc.
153 Note : Une illustration sur une hauteur de 20 lignes ; le texte reprend sur les 4 dernières lignes
159 Note : Paul, Épitre aux Romains, 6, 19-23
160 Note : Augustin, De Fide et Operibus, I, 15, 24
163 Note : Paul, Épitre aux Hébreux, 11, 6.
166 Note : Jean, 3, 18.
178 Note : Paul, Épitre aux Éphésiens, 4, 26-27
180 Note : Jacques, 4, 7
181 Leçon non conservée : ne me menaces
184 Leçon non conservée : est manque
187 Leçon non conservée : quant vit q.
189 Leçon non conservée : comme dit job
192 Note : Augustin, Sermones, Sermo I, XXI, 11
196 Note : Augustin, De verbis Domini et Apostoli, XVII
200 Note : Paul, Épitre aux Hébreux, 11,  6
209 Leçon non conservée : o. precieritis c. – Note : Marc, 9, 23
212 Leçon non conservée : de Raspii – Note : Suivent 10 lignes en blanc.