|41 La premiere temptation de la foy.

|42Selon que dit le Saige, |43 a l’heure de la mort, le cueur a congitation moult forcenee et est en telle douleur comme celle qui enfante, |44 car c’est l’office de l’ennemy de nous mal conseiller, |45 comme dict sainct Bernard. |46 Pourtant fait il comme le corbel, qui premierement mangeue l’œil de l’homme affin qu’i ne le voye venir devers luy. |47 Et ainsi il oste a l’homme l’œil de la foy, qui est le fondement de salvation, en luy mectant au devant que son ame est corruptible et mortelle, |48 comme recite le Saige ou second de Sappience, |49 et qu’i n’est ne paradis ne enfer, et luy mect au devant les roys et princes payans et grans philozophes, |50 qui jamais [v] n’ont adoré Dieu et ont vescu moult puissamment, |51 comme Alixandre, Salemon et aultres.

|52 Secondement luy dict que Dieu ne l’a point faict pour estre dampné |53 et, s’il estoit ainsy, il ne pourroit aller au contraire, car l’on ne peult muer la sentence de Dieu. |54 Et, par ainsy, Dieu ne doit point créer la creature pour la deffaire, |55 car nul saige ouvrier ne faict aucun ouvraige sur esperance de le despecer. |56 Et, s’il estoit ainsi, sembleroit que Dieu fut muable. |57 Et nous veons plusieurs gens lesquelz en leur vies aulcunement ont bien vescu et en la fin sont estéz dampnéz. |58 Et puis apprés luy dict que la personne est subjecte es choses celestielles, t|59 esmoing le Philozophe, |60 et convient soy gouverner par itelles, |61 car il a vescu selon les planettes ou y a esté néz et ensuyvi sa complexion. |62 Pourtant, il ne doibt point estre dampné. |63 Et, par ce, vous pourrez apercevoir en la figure ou premier livre cy devant, folio iiie, |64 de laquelle figure est l’ennemy qui mect l’ostacle affin que le malade ne voye Dieu et ses sainctz. |65 Au devant de luy sont les payens adorans les ydoles et, au dessoubz, ceulx qui [22r] pouvrement meurent en la foy chrestienne.

|66 La premiere consolation et remonstrance de foy.

|67 Apprés la temptation que l’ennemy faict a nature humaine, |68 Dieu, lequel ne nous laisse point tempter oultre ce que nous pouvons soubstenir, |69 comme dit sainct Pol, |70 sy envoye a l’ame foy et esperance en luy remonstrant sa creation, premierement quant a l’ame, laquelle est immortelle, fille de Dieu, douhee du Sainct Esprit, remplie de saigesse, heritiere de paradis. |71 Et cecy prouve l’ange en respondant aux temptations de l’ennemy : |72 premierement, amenant en tesmoignaige les philozophes payens comme Aristote, Platon, Socrates, Pitagoras et aultres plusieurs disant l’ame estre immortelle. |73 Et cela nous veons par raison. |74 Premierement a cause que Dieu est juste et rend a ung chascum selon sa desserte. |75 Et nous veons en ce monde plusieurs maulvais lesquelz ne sont pugniz. |76 Il convient doncque en l’aultre sieccle qu’ilz soient pugniz. |77 Comme dict Nostre Createur aux dampnéz : |78 « Allez, mauldictz, ou feu pardurable. » |79 En[22v]cores voyons nous que toutes choses sont creéz pour le service de l’ame. |80 Ainsi elle est plus noble que le corps |81 et, nonbstant que Dieu l’a creé pour salvation, si lui a il donné franche volunté a bien faire affin qu’elle en aye merite, |82 car l’on ne doibt avoir si grant bien que Paradis sinon par aulcum labeur. |83 Et, quant l’on mect au devant les payens adorans ydolles, l’on peult congnoistre leur foy estre petite, |84 car en icelle ilz ne font nulz miracles comme en la nostre |85 et, jaçoit ce que, selon le corps, nous soyons subjectz aux planettes a cause qu’il est composé des quatre elemens, l’ame est spirituelle sans quelconque matiere. |86 Pourtant a nulle chose elle n’est subjecte fors que a Dieu, |87 car le filz n’est subject que au pere. |88 Sy se doit doncques l’ame conformer aux anciens Peres, qu’ilz ont esté saiges, |89 comme Noé, Ysaïe, Jheremye, David, Salomon, Moÿse, Abraham, |90 lesquelz, selon l’ame, en Dieu tant seulement ont mis leur espoir, |91 comme il appert en la figure cy devant, folio .iiiie., |92 au dessus de laquelle est Dieu avecq les anciens Peres du Viel Testament et les sainctz du Nouvel, |93 lesquelz luy monstre l’ange en [23r] disant qu’i doibt adherer a la creance de tant saiges et sainctes gens qui tous les jours font grans miracles. |94 Et, par ainsi, au desoubz sont les ennemys qui s’en vont confonduz.


43 Note : Référence non identifiée
44 Note : Référence à Bernard de Clairvaux non identifiée, mais l’idée se trouve chez Léon Ier, Sermones, XXVII, 3, (De Nativitate domini).
46 Leçon non conservée : mageue
47 Note : Henri Suso, Horologium Sapientiae
52 Leçon non conservée : point faire pour
58 Note : Henri Suso, Horologium Sapientiae
60 Leçon non conservée : selon le planettes
68 Note : Paul, Premiére Épitre aux Corinthiens, 10, 12.
78 Note Matthieu, 25, 35.
80 Leçon non conservée : il donner f.
93 Leçon non conservée : tous le jours